Assumer son complexe d’Œdipe

Article : Assumer son complexe d’Œdipe
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20 juillet 2016

Assumer son complexe d’Œdipe

Assumer son complexe d’Œdipe !

Les intellos ne sont pas les seuls à observer et à analyser l’évolution des choses dans le monde réel comme virtuel. Gorgui est aussi, fin scrutateur de ce qui l’entoure. Dans la rue ou dans le bus, au marché ou à la mosquée. Il regarde et compare. Mais il a remarqué que tout a changé.

Pour Gorgui, la vie est comme sur une moto Jakarta, ce moyen de transport, pas cher, que les jeunes sans boulot utilisent dans beaucoup de grandes villes africaines pour gagner un peu de sous. Quand vous êtes derrière le conducteur, il faut suivre le mouvement. Quand la moto tourne à gauche, ou à droite, il faut que ton corps se laisse aller. T’inquiète mon gars ! Et tout ira bien. Tu arriveras à destination en un seul morceau.

La découverte de Gorgui, ce n’est pas ces évidences qui crèvent les yeux des aveugles. Par exemple, il y avait le droit d’aînesse, les grands avaient le pouvoir sur leurs cadets. Et puis ta femme était vraiment « ta » femme. Elle s’occupait de toi comme de son prince, n’avait d’yeux pour tes désirs et tes ordres. Tu désires de l’eau, tu es servi ! Tu la veux fraîche pour ton palais ou tiède dans une bassine pour clamer la douleur de tes pieds ? Vous la voulez dans la salle de bain avec du sel, ou dans la bouilloire pour vos ablutions ? Jadis, les épouses dociles comme du beurre dans la bouche et elles disaient en chantant : « Tes désirs sont tes ordres, tu es mon marabout, mon oncle, mon trésor chéri, c’est toi qui a la clé qui ouvre mon paradis, si tu tousses, j’éternue. »

Tout a changé maintenant constate Gorgui avec un brin d’amertume. Aujourd’hui plus question de donner une fessée à son enfant ! Non il y a les droits de l’enfant ! Tu veux congédier ta femme ? Parce que tu en rencontré une autre plus jeune et plus belle, plus adaptée à l’air du temps comme les nouvelles voitures ou les ordis et tablettes dernier cri. Mais ce n’est plus possible. Il y le droit des femmes. Eh oui. Maintenant, ta femme est sur Facebook, quand elle n’est pas dehors pour faire ses activités. Et tu n’oses rien dire : chut !  Il y a des associations et des ONG puissantes pour la défendre si tu n’es pas content ! Quand tu rentres à la maison, tu te débrouilles : allume le gaz ou mets du charbon et des braises dans le fourneau malgache pour chauffer ton repas mon gars, à moins que tu aies mangé dans une petite gargote.

Tout marche par la tête aujourd’hui. Il n’y a plus d’autorité. Chacun a le droit de crier à la radio pour dire qu’il n’est pas content ! « De quoi t’en mêles-tu toi ? »

Mais Gorgui observe tout cela avec un brin de nostalgie. Il observe aussi que l’air des : deuxième, troisième et quatrième femme est révolu. On ne peut plus avoir des « bureaux » à tous les coins de la ville. Non parce que la loi l’interdit, elle n’a pas eu besoin de faire un texte pour le prohiber. La conjoncture s’en est chargée, comme faire craquer une allumette dans une raffinerie.

L’occasion fait le larron et la conjoncture est devenue un allié fidèle pour les femmes jalouses comme pas possible malgré de taux de célibat si important dans leurs rangs. Conjoncture, contexte ou situation économique. Ce n’est pas une sinécure pour les hommes : les poches sont vides, le stress gagne les mâles qui ne mangent plus de viande ne boivent plus de lait. Rien que de la bouillie de survie.

Mais la vraie découverte de Gorgui, c’est autre chose de plus sensationnelle que tous ces clichés de déjà vu. Dès demain, il ira protéger au service des droits d’auteurs cette idée géniale qui vient de naître dans sa petite tête. Gorgui a observé et bien vu un changement radical, révolutionnaire ! Et ça, les hommes devraient le savoir et veiller à faire un investissement utile pour la retraite, quand tu seras au bout du rouleau, vieux et usé. Avec rien dans les poches. Quand on attend plus de toi rien au lit.

Cette idée, est un vrai coaching-gagnant. Quand tu fais un changement tactique qui vient perturber tous les plans de ton adversaire pour te permettre de gagner le match mon gars ! Il ne verra que du feu le pauvre.

Quand il fut jeune, il entendait les gens chanter une vieille chanson populaire : « Les garçons avec les hommes et les filles jouent chez les femmes. » Il n y avait aucune dérogation à cela. Les récalcitrants étaient taxés d’efféminé ou de garçon manqué.

Aujourd’hui il a vu, de ses yeux, vu, dans son quartier, dans la ville et partout dans le monde : les garçons ne s’occupent que de leurs mères ! Tout-jeunes déjà, ils rêvent de réussir pour leurs mères ! Plus grands, ils veulent les rendre heureuses. Les performances des sportifs sont dédiées à leurs mamans, les rengaines des chanteurs, Tupac ou Papa Wemba ou Omar Pène… c’est « comme j’aime ma mère !», « ma mère est la plus belle et la plus gentille. »

Même les émigrants qui affrontent les vagues de l’océan Atlantique et de la mer Méditerranée ou les lutteurs qui reçoivent des coups dans l’arène, veulent « aider leurs mère », « les amener en pèlerinage à la Mecque ou à Rome », « leur construire une maison » !  Ils disent tous : « Ma mère est fatiguée, je veux l’aider ».

Quelle ingratitude ! A croire que les pères sont des « semeurs distraits » qui n’ont jamais acheté d’ordonnance, qui n’ont jamais inscrit leur garçon à l’école, qui n’ont donné ni gîtes ni couverts à leurs progénitures mâles.

Quand il a demandé aux intellectuels, ces grands diplômés qui ont tout appris, ils lui ont expliqué que c’était le complexe d’Œdipe !

Depuis Gorgui a pris une résolution. Il a décidé d’investir sur sa petite fille chérie ! Quand il revient du boulot, une belle chaussure, c’est pour elle, une robe. C’est encore pour elle. « Viens voir si celle-ci te plait ma chérie. Et Dimanche, on ira au restau, tu veux, rien que toi et moi ? », Ou « Viens donc faire tes exercices princesse et quand tu auras fini, je te raconterais une belle histoire. Je veux que tu deviennes professeure, avocate, juge, ingénieure, générale d’armée ou qui sait, même présidente de la république ma fille. »

Et quand les garçons rouspètent, Gorgui répond : « Allez donc dans la chambre de votre maman, vous ne voyez pas que  vous la déconcentrez. » Et il avertit les autres garçons du quartier qui lorgnent déjà cette petite fille : « gare à vous, si vous touchez à ma fille ! ». Aux futurs prétendants Gorgui lançait déjà quand il sortait le soir se promener avec l’adolescente : « Epargnez bien les gars, je suis entrain de beaucoup investir sur elle ! Celui qui veut épouser une guenon doit apprendre à monter sur les arbres

Et à ses garçons, il répétait sa nouvelle phrase fétiche : « Ouste ! Allez donc voir votre maman adorée, les papas ne s’occupent que de leurs filles. »

Ça s’appelle assumer son complexe d’Œdipe !

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